2021
Photographie à la chambre
et poésie de © Kotsuhiroi




Hymne Cannibale pour un Paradis Perdu
Premier Mouvement
Sortir les mots de la bouche
ces mots étouffés
et des seaux de nuit
renversés sur des vitres
Attaché à ce lit
pour calmer mes émotions
un lit d’angoisses
rempli de somnifères
Nous sommes des automates
dans la chaîne d’un destin
déjà déterminé
Je remplissais le temps de chaleur
j’essuyais les bruits
j’avais envie de laver le vide
Une rivière d’urine coulait sous la table
bétail humain dans l’arène des fous
Accrochés à nos illusions
le cœur errant nous naviguons
au gré des vents puants d’orgueil
Un bain de sang et de mensonge
nos rêves à la fenêtre
nous attendons une autre vie
Tournez en rond comme des canards
il reste encore une heure de soleil
puis rentrez dans votre boîte
pour attendre qu’on vous autorise
à respirer de nouveau
Le regard qui bavarde
vous faites votre dînette
et vous êtes sage
comme une image
Les mains écorchées par les voyages
blessées par la fatigue
des jours trop longs
ces mains qui cherchent la tendresse
Et l’ennui de ces surfaces qui n’ont rien à dire
Le terreau des mots qui jalonnent le temps
et nous crient de ne pas oublier
Le pot aux roses va s’effondrer
et l’horizon se réveillera
J’ai mangé ma folie et mes cauchemars
et je tue le temps
pour ne pas qu’il revienne
Toutes ces couches de merde
et ce vernis à ongles
aussi long qu’un discours
Ces bouches qui tombent en ruines
et toutes ces conneries
que l’on nous débite à longueur de journée
J’ai vu passer des hommes travestis
pour fuir devant la médiocrité
maquillés à souhait
comme des arcs en ciel
Un ciel rouge
tué par nos regards
pervertis de mensonges
il pleut des fleurs perdues
des jours fatigués
des cicatrices de souvenirs
Il faudrait s’accoupler à la beauté
et fuir
fuir encore
Je pense que mes rêves
sont en train de tourner la page
de quelque chose
Second Mouvement
Milieu d’après-midi et il fait nuit
Une camionnette blanche dans la rue
s’arrête et repart lentement
tourne puis revient
s’arrête encore
et repart de nouveau
Il surveillait quelque chose
Les chiens ont souffert et agonisé
pendant trois jours
Ils avaient été empoisonnés
Une lente et terrible agonie
leur assassin n’a jamais été retrouvé
Enterrés au fond du jardin
j’y pense très souvent
Dehors un homme tourne en rond
rongé par la rage
il bave sa colère
lui a empoisonné des chats
un bouffeur de merde
il pissait sur sa gamelle
pour ne pas que les autres
puissent en profiter
Une salle d’attente
je suis seul pendant un long moment
puis c’est à moi
Des détails sans importance
un échange de regards
et après ma bouche se remplit
de souffrance
de solitude
de souvenirs égarés
J’étais enfermé dans une armoire
à écrire des lignes de lumière
et à entendre le bruit de la pluie
Troisième Mouvement
Son ventre avait changé
et l’odeur de son corps aussi
elle tenait le temps dans ses mains
Sans rien dire les jours avançaient
elle mangeait des plumes
des plumes dans son assiette
Il y avait l’odeur de l’amour quelque part
et le vent comme allié
pour saisir les rêves invisibles
La porte était ouverte
le délice de voir
la beauté s’accoupler
des larmes semaient leurs graines
Quand les anges te donnent des cailloux
dis-toi que tu retrouveras ton chemin
Kotsuhiroi - Winter 2021